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" Les temps sont durs
pour les artistes ... " entend-on à tous les coins de rue.
D'abord ils sont durs
pour tout le monde (ou presque) et puis ça ne sert à rien de se
plaindre.
C'est ce que Pseudo a décidé de ne plus faire.
Constatant que la paupérisation le menaçait de partout il a décidé
de devenir plusieurs artistes* en même temps, et de mulitipler ainsi
ses revenus.
* artistes : Dans
des genres (des styles dirait-on) assez différents pour occuper
le plus de place possible sur le marché.
Méfiez-vous, il mange à tous les ateliers.
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Trois artistes pour le prix
d'un !
Et bientôt quatre (plus un gratuit) ; tout le monde était d'accord.
Seule contrainte (mais de taille croissante) pour le créatif, l'obligation
de démonter et de remonter les différentes expositions toutes les deux
heures puis de se transformer rapidement en son avatar artistique suivant.
Donc travestissement de rigueur, exercice pour lequel Pseudo devint bientôt
assez habile.
Franchement,
vous l'auriez reconnu ?
Plus difficile était de leur
trouver une identité, le directeur mit à contribution Guy Molet.
Il lui recommanda un " fort flou artistique " (ce sont ces termes).
Notre poète se fit alors aider par Peldugland et dix minutes plus tard
le prolifique duo présentait à Pseudo ses quatre futurs avatars :
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- Van der Déderre, le fumiste* belge
* fumiste : Bien qu'il
ne fume pas que du belge, loin de là.
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- Lubric,
un naïf balnave* sous-verre
* balnave
: La Balnavie nous encercle.
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- Paco Modo, frère méconnu
de Zorro, le peintre masqué qui signe à la pointe de l'épée d'un
grand Z, c'est d'un chic !
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- Huile-Delain, un
grand classique (à redécouvrir prochainement).
Longtemps éclipsé par
ses glorieux contemporains, Huile-Decoude et Huile de Vidange,
il n'en a que plus de mérite ; surtout qu'il est mort.
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" Pas mal. " apprécia
le responsable.
" On ouvre demain ! " décida le directeur et il claqua des doigts.
Les créneaux
horaires
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10h 15 . 12h
Van der Déderre |
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16h 15 . 18h
Huile-Delain |
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Une idée géniale était venue
à Pseudo : s'il pouvait faire des peintures a peu près carrées et suffisamment
indécises, il n'aurait qu'à les basculer toutes les deux heures d'un quart
de tour (disons à gauche) et l'exposition en serait transformée.
" 14 H, silence on tourne ! " commanda Pseudo à la manoeuvre.
Agrippée au cabestan souterrain, l'équipe au grand complet fait grincer
les lourdes chaînes (Miss Clitorini est charmante en petit mousse) ; on
entonne une vieille chanson de marin pour aider à l'effort :
" Ho hisse et ho, il était une petite peinture qui n'avait ja, ja,
jamais navigué ... "
Insensiblement, les peintures
pivotent, il n'y a plus qu'à redresser les récalcitrantes.
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Un long sifflement
retentit soudain :
" 16 H, tout le monde sous le pont, c'est l'heure d'Huile-Delain
... "
On court dans tousles sens.
" Je vais pas tarder à hisser le grand FUCK ! " râle Peldugland
proche de la mutinerie.
" Ou le carré noir sur fond noir ! " enchérit Octave des Obres,
son compagnon d'infortune.
" C'est un fameux gros mat poilu comme un veau, hisse et ho ...
"
Et toujours ces chansons idiotes.
Malgré ces intenses préparatifs, l'exposition fût une vraie pagaille,
les peintures ne tournaient pas toutes à la même vitesse et les petits
cartons explicatifs non plus.
Impossible donc de savoir qui avait fait quoi.
Comme personne n'y connaissait rien, ce n'eut pas de grandes conséquences.
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L'important c'est qu'il y ait
des étiquettes ; et surtout des prix qui eux sont restés fixes de chez
Fixe.
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