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D'une enfance chaotique, Nono
a gardé des séquelles et pas grand-chose d'autre.
C'est un véritable " enfant sauvage " péri-urbain, il ne sait pas lire,
pas écrire et surtout pas se concentrer ; il peut juste compter jusqu'à
dix les gnons qu'il reçoit et ceux qu'il donne.
Nono dans
son quartier, réservé.
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L'avenir ne
se présentait pas sous les meilleurs auspices civiles, et militaires
non plus car l'armée, autrefois refuge des analphabètes n'en veut
plus, ni la religion, ni le commerce, ni l'industrie, personne.
Alors quoi ?
Devenir footballeur ? |
Impossible car avec son obésité
chronique, Nono ferait le poids mais ne peut guère courrir, il ne reste
plus que le terrorisme ou la révolution, seulement la révolution ce n'est
pas pour demain, c'était hier et Nono ne veut tuer personne, surtout pas
lui-même.
Se suicider ou devenir artiste ?
C'est un peu la même
chose mais Nono s'en fout (il a cet avantage sur les autres) car
socialement, il est déjà mort.
Il sera donc un artiste,
mais pour cela il faut produire un (ou des) objets d'art, Nono sortit
faire un tour dans le quartier des Favorisés.
En bas de l'immeuble,
dans une poubelle à demie consumée, il trouva un rouleau de plastique
noir, reste invendable du cambriolage nocturne ; à l'intérieur se
trouvaient de grandes lettres géométriques prédécoupées et autocollantes.
Il ramena le tout dans
la cave où il avait ses habitudes, il disposa les signes noirs sur
du papier blanc et se recula pour regarder, c'était pas mal et pour
une fois, il fût content de lui.
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Les imprécations
vont par quatre
et quelquefois par deux,
jamais seules
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Daniel Burin, qui tournait
dans le coin à la recherche de son scooter récemment disparu, aperçut
ces curieux assemblages et proposa à Nono de les montrer à la fondation
Gellipane, ce qui fût fait et explique la présence de ces assemblements
bicolores sur nos cimaises.
" C'est un véritable conte de fées que vous nous racontez là !
"
Malheureusement, oui.
Les " assemblements
" vont par quatre et quelquefois par deux, jamais seul.
Pourquoi ?
Parce qu'à mon commandement, assemblement !
Souvent ils ne vont pas, ou passablement.
Alors Nono recommence, tout simplement.
Ainsi il ne s'ennuie jamais plus, même s'il a la vie entère devant lui,
son immeuble et sa cage d'escalier.
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