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La peinture d'histoire est
un genre prestigieux mais totalement oublié de l'hisoire de l'art.
Soucieuse de sa grandissante réputation et consciente de ses responsabilités
(lesquelles ?) la Fondation Gellipane a décidé d'ouvrir toutes grandes
ses portes ignifugées à un de ses plus remarquables représentants :
Paul Lanqueteau.
Surnommé " le président " pour sa fermeté ou plus familèrement " le vieux
pané " pour son érudition sans failles, Paul Lanqueteau y expose tout
un cycle arrondi et prestigieux :
" Les grands hommes de l'histoire de France ".
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De gauche
à droite : Fouquier-Tinville, le fameux terroriste au sortir d'une
réunion du comité de Chahut-Public bien arrosée de sang frais, un
roi fainéant au réveil en milieu d'après-midi, Napoléon pètant dans
la cour des invalides qu'il fabrique à la tonne et un roi maudit,
Louis 16, priant pour qu'on soit plus gentil avec lui.
Comme il fallait s'y attendre dés qu'on touche au patrimoine, les
mécontents furent nombreux, ce fût même une tournée générale ( pardon,
un tollé général ), une levée de boucs liés ensemble et un énorme
concert de klaxons républicains. |
Les religieux
célèbres : l'euro-moine, précurseur et visionnaire présente la nouvelle
monnaie molle, Saint Bernard de Miribel, perpétuel réformateur et
insatisfait chronique, au dessous, un authentique savant, Dom Pélignon,
vrai bénédictin et grand distillateur et l'incroyable frère Clément
qui préférait s'occuper des jeunes (un peu trop selon sa hiérarchie).
Le soir du vernissage restera dans nos annales, cris, insultes, pugilat
et gifles, tout le monde s'en donnait à coeur joie selon sa désormais
inévitable " sensibilité ". |
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Tout en bas
comme il se doit, le tiers-état est aussi représenté avec Bonnet Blanc,
l'ancêtre commun, Blanc Bonnet, le philosophe des chaumières et un
anonyme bonhomme normand.
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On frôla même
le fait divers quand Octave des Obres et l'exposant s'attrapèrent au col
avant de rouler à terre agrippés l'un à l'autre en se donnant des coups
de genoux.
Les assistants eurent beaucoup de mal à séparer les deux furieux ensanglantés.
Leur inimitié ne datait pas d'hier, elle était de toujours, enfin depuis
qu'ils se connaissaient.
D'abord instinctif durant leurs chères études, ce sentiment était depuis
conforté en permanence par d' innombrables indélicatesses et de somptueux
coups bas.
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Note : A la
Fondation Gellipane on supporte à peu près tout, sauf la violence
; alors plutôt que de vous infliger le pitoyable spectacle d'un combat
de coqs ventroptents mais toujours immatures, nous avons préféré vous
montrer un aquarium, c'est plus reposant. |
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Sans compter les
rivalités amoureuses, ce qui fait beaucoup.
Une phrase mondaine et provocatrice d'un Lanquetau bien éméché fut l'étincelle
qui mit le feu à la vase trop longtemps accumulée :
" Octave des Zobs, hi, hi, hi, avec une petite pyramide au dessus,
hi, hi, hi ! "
Le sang du "
touriste " ne fit qu'un demi-tour tant il ne pouvait supporter de
voir moquer sa chère Pavart-Davieu ; sa réplique fut cinglante :
" Vous vous y connaissez, vous le peintre des plus grands zobs de la
France ... "
Le débat d'idées se présentait mal, par l'arrière.
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Après on se serait cru
dans la cour de l'école.
Octave des Obres donna un coup de pinceau dans l'oeil du moqueur
tandis que ce dernier lui mordait cruellement l'oreille.
Premier sang, stop, le duel était terminé et l'honneur, que l'on
croyait définitivement perdu, avait juste glissé derrière un radiateur.
La rapide et préhistorique
empoignade.
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Dans les toilettes
de la Fondation, l'artiste officiel se fait soigner, on a posé délicatement
un bandeau noir sur son oeil endolori, il se regarde dans le miroir :
" Pas mal, on dirait Hannibal ! "
" Le cannibale ? " demande madame Lanqueteau effrayée.
" Non pas lui, le montreur d'éléphants, le frère d'Hasdrubal Barca
! " répond le faux borgne qui a de la culture, on ne peut pas lui
enlever ; et pourquoi donc lui enlever ?
Rentré chez lui Octave soignait son oreille coupée :
" Super, ça fait peintre, un genre pas comme un autre ! "
Mais d'abord il allait devoir souffrir un peu, il déboucha l'eau oxigénée
...
Dans la salle d'exposition, on ne parlait plus que de " l'incident ".
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Un énorme scandale et
donc une très bonne publicité pour la Fondation.
" Lanqueteau, on ne le reverra pas de sitôt ! " se moquaient
ces collègues érudits.
Et pourtant, dans cette magnifique exposition, les petits découvriront
ce qu'ils ignorent encore, les moyens apprendront ce qu'ils devraient
déja connaître et les grands se rappeleront ce qu'ils ont oublié.
C'est donc très positif et plutôt sérieux car on ne plaisante pas
avec l'inconscient collectif.
Paul
Lanqueteau impassible au milieu des polémiques et controverses.
Et si vous n'aviez jamais vu d'exposition, pourquoi pas commencer
par celle-ci ?
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