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MATHILDE
+ P.C.M.
Le 21 mai à Torbes
Il faut boire
à la souce, boire à la source de la vie ...
De Doloron à Torbes
il n'y a que le pont à traverser, mais cela peut prendre du temps, à cause
du vent.
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Les premiers échos
de la campagne publicitaire de Bertrand n'avaient eux, pas été
freinés par les bourrasques et les torbaises étaient dans tous
leurs états moites à l'annonce de son arrivée prochaine.
On ne vantera jamais
assez les bienfaits de la réclame.
Le garçon sortit vite son ... stylo pour signer négligemment des
autographes avant de serrer quelques ... mains.
Foin !
Les torbaises assemblées ne le calculaient même pas, guettant
toujours l'apparition du " vrai " candidat.
" Mais enfin, Bertrand Biquet, c'est moi ! " protesta t'il vainement.
On ne voulut jamais le croire, il était tellement moins bien que
sur les affiches !
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Vexé, il se transforma
en courant d'air pour aller plus vite.
En arrivant le l'autre côté de la rivière*, Lapin.Blanc.Rapide était presque
mort de faim.
Par la fenêtre entrouverte d'un restaurant lui parvenaient d'incroyables
odeurs de nourriture céleste.
" Hmmm ... ça sent drôlement bon ici ! " complimenta le garçon en passant
le nez (c'est une image) à travers la porte de service.
* rivière :
La Nusse coule ici, à flots.
La cuisinière
était tranquillement assise, dévorant aves avidité un roman-photo.
Le terrible " coup de feu " était passé et les douze coups de midi* étaient
déjà loin.
* midi : Les
douze coups de minuit sont plus rapides (dixit White Speed Rabitt himself,
ça ne m'a pas frappé)
Bertrand demanda
s'il était toujours possible de manger quelque chose, peut-être une petite
omelette torbésienne.
" Salut Mathilde, à bientôt ! " saluaient les derniers clients.
A regret, la jeune femme abandonna sa lecture, de toute façon c'était
l'heure des " Feux de l'amour et du hasard " et elle alluma la télévision.
Bertrand lui dit de ne surtout pas se déranger et qu'il serait ravi de
pouvoir regarder cet épisode en sa compagnie car c'était une série qu'il
suivait aussi avec passion.
Quand ses nombreuses occupations le lui permettaient, c'est à dire jamais.
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Mathilde
lui posa immédiatement des questions sur l'épisode en cours :
" Est-ce que ça allait marcher entre Roxe et Rouki ? "
" Et comment va réagir Marc quand il va le savoir, (s'il le sait
un jour) ? "
Les saucisses
frétillaient au milieu des lentilles ...
" Et pourquoi
Sandra a t'elle fait un enfant avec Jim alors qu'elle aime John
? "
Lui aussi se posait sérieusement la question :
" Sinon, à quoi bon ? "
En effet.
Sacrée
Mathilde
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Mathide était
incroyablement fleur bleue mais nuance pastel clair.
Elle vivait dans un monde où les princesses sommeillaient langoureusement
en attendant le fils du roi* qui finirait bien par passer pour les embrasser
sur la bouche une fois.
* roi : En
l'attendant toujours, elles finissaient par se marier, vivre longtemps
et avoir beaucoup d'enfants.
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Sans doute Mathilde,
qui entre-temps était revenue de la cuisine, croyait aussi au prince
charmant ; c'était la chance du Lapin.Blanc.Rapide.
Il prit un air atrocement mélancolique avant d'avouer :
" Je suis
le petit prince charmant ... mais je suis victime d'un affreux sortilège
dont je ne puis me délivrer tout seul (sinon je l'aurais déjà fait
depuis longtemps !)."
C'était risqué.
" Je pèle du gland* ! " souffla le garçon à l'oreille fine que lui
tendait Mathilde.
* gland
: A ce douloureux sujet consulter les confidences de Sylvie Rousbol,
la doctoresse.
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" C'est pas vrai
! " s'exclama Mathilde, qui n'était pas encore revenue (de sa surprise)
et laissa choir le plat d'oeufs pochés aux truffes.
Pour la consoler Bertrand l'a fit aseoir sur ses genoux serrés et entreprit
de raconter son historiette dûmant :
" Hum, hum ... il était une fois un prince tellement charmant que toutes
les filles du pays en étaient amoureuses.
Donc tout serait allé très bien pour lui sans ce regrettable incident
: une des fées présentes penchées sur son berceau avait, tout en papotant,
malencontreusement laissé traîner une main distraite mais un peu vénéneuse
sur son petit zizi tout frais.
Les maladroites
fées.
Les autres de la disputer mais hélas, le mal était fait, et depuis cet
instant le pauvre enfant n'avait plus cesser de peler du gland. "
" C'est vraiment terrible ! " s'écria Mathilde revenue de son étonnement.
" On essaya toutes
sortes de remèdes pour le soigner, on fit venir à son chevet les plus
grands et les plus habiles médecins, guérisseurs, magiciens et charlatans
du pays ; ils durent tous reconnaître leur totale impuissance devant le
phénomène.
Qui heureusement n'était pas physiquement douloureux.
Cependant
les femmes du royaume assiégaient la porte du château, espérant
toutes devenir la favorite du petit* prince. "
* petit
: Rappelons qu'en Amérique ils sont vraiment minuscules (pour celles
que le crime de bèse-majesté intéresse).
Pour le
soigner, lui redonner des forces et de la bonne humeur (et aussi
se faire bien voir), elles lui confectionnent d'énormes gâteaux.
Ceci étant précisé, laissons Bertrand poursuivre son récit, et son
actuelle chimère :
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Paul, c'était
son nom charmeur, racontait des histoires (comme moi) aux pucelles pour
les faire patienter mais à cet âge, ça ne peut pas durer bien longtemps...
"
Paul entouré
des pucelles supposées* :
" Aujourd'hui nous allons jouer ... aux devinettes ! "
" Encore, la barbe ! " lui répond l'écho féminin exaspéré.
* supposées
: N'allons pas y regarder de trop près, bien que ...
" Je comprends
... et alors ? " questionna l'auditrice suspendue (c'est une image aussi)
à ses lèvres.
" Alors, l'histoire officielle s'arrête là ... répondit Bertrand ... il
existe trois fins différentes à ce conte : dans la première version, le
petit prince charmant en a subitement assez de tout ce cirque et il part
ce faire moine au bout du monde. "
-
La véritable histoire du petit prince -
De l'oncle Paul,
celui qui rétablit sa vérité.
L'enfrance
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Le
petit prince était si petit que tout le monde se moquait. |
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Surtout
les filles ... en 1999 c'était toujors pareil. |
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Même
les animaux du parc rigolaient sur son passage. |
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Suite princière
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Il
partit sur une autre planète, verte et bien carrée. |
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Avec
des moutons blancs aux angles biens droits. |
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Il y écrirait des mémoires, courtes. |
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" C'est trop triste
... sanglota Mathilde ... et la seconde hypothèse ? "
" Je reprendrais bien
un peu de galantine aux pruneaux ... voilà, juste une mignonne tranche,
merci ... c'est pour finir mon pain ... dans la deuxième version ... poursuivit
Bertrand la bouche pleine, tout en s'assurant une prise sur les hanches
rondes et lisses ... dans la seconde version, donc, la vilaine fée à l'origine
de toute cette histoire est prise de remords et revient voir Paul afin
de dénouer le sortilège en lui faisant boire une potion magique de sa
fabrication."
" Ah, ça c'est gentil ... " commenta Mathilde revenue s'asseoir sur les
genoux de Bertrand après un petit tour aux toilettes.
Le garçon en profita, tel un python réticulé, pour resserer son étreinte.
" C'est effectivement une délicate intention, mais pareille chose n'existe
que dans les contes de fées ... Malheureusement ! " dit Bertrand en prenant
son air le plus langoureux.
Que d'aucuns,
et surtout d'aucunes trouvent comique.
C'est parce qu'elles ne m'ont pas bien regardé.
" Et la troisième version ? " questionna Mathilde en sautillant agréablement
sur les cuisses du jeune homme.
" La troisième ... sembla s'interroger Lapin.Blanc.Rapide ... la troisième
? "
Il se pencha et posant alors son nez sur le tablier fleuri*, il ajouta
d'un air gourmand :
" Hmmm ... ça sent drôlement bon ici ! "
* fleuri :
Des fleurs bleues évidemment.
Il était grand
temps de fermer boutique, c'était ça la troisième solution.
Les rideaux métalliques sont baissés, la boutique est fermée ; Mathilde
et Bertrand sont à l'intérieur.
Que peuvent-ils bien faire ?
Nous avons quelques soupçons.qui ne nous regardent pas, c'est entendu,
mais nous les regardons quand même par ce providentiel trou de serrure.
Il va nous permettre d'en savoir un peu plus sur les secrètes activités
de notre couple romantique.
Nous salivons déjà, essuyons-nous et approchons sans faire de bruit afin
de jeter un oeil voluptueux dans la pièce assombrie.
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Le fameux trou de
serrure, en fait on y voit rien de vraiment intéressant.
A moins
d'être pile-poil en face, et dans l'alignement.
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Première constatation,
nos deux héros sont toujours habillés, et tranquillement assis.
Serait-ce ce qu'on appelle un amour platonique*?
* platonique
: Type d'amour où le contact est impossible.
Mais pas impensable, c'est tout le problème.
Pratique masochiste seulement envisageable en atmosphère contrôlée.
Une chose a changé
cependant : c'est maintenant Bertrand qui est sur les genoux de Mathilde,
écoutant d'un air ravi les histoires que celle-ci lui raconte.
Le garçon semble complètement abasourdi :
" Ah bon, et la belle princesse l'a planté là, sur le bord du chemin ?
"
Il en est tout tremblant.
Mathilde le rassure comme elle peut :
" Mais elle va revenir, elle est juste partie chercher du ... du riz long
grain incollable chez son oncle Protobène, ce n'est pas loin ... elle
sera bientôt de retour ! "
L'abando (pensez,
à changer le disque).
Lapin.Blanc.Rapide
en est quand même tout bouleversé, ce qui prouve qu'il n'est pas le monstre
insensible qu'on suppose parfois.
Il joue avec une bretelle de dentelles fines.
" Et que va faire le dragon à longue queue et langue bifide*avec la princesse
? " demande t'il soudain, affolé.
* bifide :
Pleine de bifidus, actifs.
" Ils vont se
marier, vivre peureux et avoir beaucoup de petits dragons ... " répond
l'apaisante cuisinnière.
" Ah bon, c'est dingue ... et le prince charmant qu'est-ce qu'on en fait
? "
" Il s'en ira charmer un peu plus loin ... "
" Tout seul ? "
" Pour l'instant ... mais je vois venir sur la route qui poudroie, entre
le moulin qui moudroie et la petite mare qui merdoie, une princesse fort
belle et de noble lignage qui s'approche au petit trot de sa haquenée*."
* haquenée
: Cheval de dictionnaire.
Citrane
est très photogénique, le petit prince se frotte déjà les mains...
Dans le restaurant
fermé, ils n'en finissent pas de se raconter des histoires à la
faible lueur des éclairages sécuritaires et normés.
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" Je la
connais ? " demande Bertrand. Mathilde lui fait signe de se taire
... et de rester un peu tranquille, puis elle continue son étonnant
récit :
" Citrane
était fille de l'illustre (suit une interminable généalogie que
nous vous épargnerons, mais qui berça doucement l'inculte lapin),
une princesse comme les autres, plutôt B.C.B.G* ... "
* B.C.B.G
: Beau Cul Bon Genre
Comme
nous le voyons sur ce camée.
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Bertrand a encore
des questions, il ne comprend pas tout :
" Quel camée ?
Beau cul, bon genre, sans doute ? "
Mathilde reprend le fil cousu de fil blanc (et bleu ciel) de son récit
:
" La toute jeune Citrane Gonnof * devait cependant se cacher de sa terrible
marâtre qui la jalousait à cause de sa beauté (normal).
Elle fit appel à la chirurgie esthétique et devint aussi moche qu'un pou.
* Gonnof :
C'est son nom d'emprunt russe.
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Les poux
(légitimes ?) avant transformation : l'amour triomphera t'il de
leur répugnance réciproque ?
Ceci calma
l'ire de sa belle-mère mais n'arrangea pas ses affaires de coeur.
D'autant plus qu'un vilain pou* ne tarda pas à tomber amoureux d'elle
... et c'est là que commence vraiment notre histoire ... "
* pou
: Qui s'avéra être aussi un prince charmant, mais ça on ne pouvait
pas le deviner.
Enfin pas au début.
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Mathilde fit une
pause, but un verre d'eau et se mit à son aise.
Bertrand s'installe bien comme il faut, pour écouter la suite.
Et la jeune femme de continuer :
" Citrane est belle mais elle a de curieuses manières qui plaisent au
petit prince Bananon, son amoureux ... "
Le garçon
est émerveillé, les yeux écarquillés, il rêve tout éveillé, l'oreille
sur le sein doux de Mathilde dont il entend battre le coeur.
De princesse.
Ils se racontèrent des histoires à dormir debout jusque tard dans
la nuit.
En oubliant de dormir couché.
Intimité
(ne pas déranger).
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TOUT
SAVOIR SUR LE PRINCE CHARMANT MODERNE
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