PIERRETTE PASSIONNEMENT
Le 2 mai à Gravounont

Rubrique - Ma vie à deux -
(extraits)

Ma vie à deux peut-être parfois agaçante (à cause des lubies du con-joint).
Ainsi Pierrette boit tout le temps de l'eau, c'est devenu obsessionnel.

Bertrand essaie de la raisonner :
Lui : " Arrête tu vas te faire du mal ! "
Elle : " Glou,glou,glou ... "
Par amour* pour elle, le garçon a décidé d'essayer :
" C'est pas mauvais ... franchement je m'attendais à pire ... "

* amour : On le fait remarquer parce qu'il y en a marre des critiques.

Bertrand était à Gravounont où il se sentait bien.
" Cest Gravounont, docteur ? " avait-il demandé à un toubib auto-stoppeur en panne d'essence.
Lui ne connaissait pas la panne des sens, jamais ; c'était même le contraire, il avait du jus à revendre.

Ses deux jerrycans étaient pleins à ras-bord, mais ses finances étaient en plein marasme.

Le trait indiquant ses maigres résultats commerciaux était depuis longtemps sorti du graphique directorial, par le bas avant de traverser le plancher et de perdre dans les sous-sols de l'entreprise.
Pourquoi ne l'avait-on pas encore mis dehors, c'était une énigme, un grand mystère plus fort que celui du triangle des templiers maudits.
Depuis des années, il se demandait quand sa mystification serait découverte, plutôt quand il serait découvert; mis au jour et impitoyablement percé.


Son imposture généralisée ne pouvait pas ne pas se voir, et tout continuait pourtant comme si de rien n'était transparent.
Afin de le motiver, ses supérieurs (hiérarchiques s'entend) avaient à peu près tout esayé :
les petites et grosses commissions, les flatteries sourdes, les fausses menaces, les bruits de couloir, les voitures piégées ... tout avait rebondit sur son imperméable inertie qui finissait par décourager même ses amis les plus acharnés.

Les pensées de Bertrand deviennent vite moroses.

Penser le fatigue et l'attriste, rêver le distrait et l'amuse, un philosophe l'a dit alors il en use et en abuse volontiers ; il pourrait même en faire un livre : " Les rêveries du branleur solitaire ".
Il y aurait peu d'action, et beaucoup d'amour en circuit fermé.
Allongé sur le couvre-lit de sa gravounonienne pension, les yeux au plafond jaunâtre, il rêvassait donc
agréablement en se grattant les roubignolles quand il entendit des petits bruits sous son lit.

 

Le gratteur

 

" Tiens, des souris .. je le dirais à la patronne ! " et il reprit sa non-activité.
De nouveau du bruit, mais pas les caractéristiques grattements propres aux petits muridés, des sortes de glissements ou froissements feutrés.
Bertrand tapa plusieurs fois sur l'épais matelas pour éloigner les éventuels rongeurs mais le phénoméne continuait.
A la fin, énervé, il se décida à regarder sous le lit et là, grosse surprise, ce n'était pas " des " souris mais une seule d'une cinquantaine de kilos, blottie sous la literie et qui ouvrait de grands yeux humides :
Pierrette.

Il ne sut que dire :
" Je me rends ! " avant de faire monter l'amoureuse courbatue sur le lit dont le sommier grinça agréablement sous ce petit poids supplémentaire.


En fait, il n'en finit plus de grincer et au petit matin blème Lapin.Blanc.Rapide était complètement vidé, mais pas comme à la boucherie.

Sans légende c'est mieux.

Et le manège amoureux recommence de tourner, ils ont heureusement perdu la tête.
Bertrand n'a plus d'idées, il se sent comme le lapin électrique à fourrure rose de la publicité qui petit à petit cesse de fonctionner au fur et à mesure que ses batteries se déchargent pour finir par s'immobiliser et mourir sans pousser un cri.

" L'amour physique est sans issue de secours ... " se dit le garçon avant de sombrer, corps et âme enfin bien enlacés.
Il ne rêva pas cette nuit.

 

Mélancolia.

Par contre il fut encore victime d'un de ces terribles accès de mélancolie qui suivent parfois l'amour.
Pour des raisons qu'il ignore*, il subissait périodiquement des accès cataclysmiques de tristesse post-coïtale.

* ignore : Et peut-être préfère t'il les ignorer, comme une bonne autruche ?

Après ces réfrigérants moments, Bertrand se retrouvait tétanisé et glacé, figé ainsi qu'une pierre qui ne roule plus (mais sans leur bienheureuse insensibilité).
Sombres, denses et opaques, ses dépressions le laissaient totalement désemparé, et surtout incapable d'articuler un seul mot, d'amour, n'en parlons même pas.
Ses partenaires alors paniquaient croyant la fin du monde toute proche.
Il redoutait plus que tout ses trous noirs* persos dont aucune lumière ne sortait jamais et qui étaient pour beaucoup dans sa décision de ne se lier à personne et de vivre finalement solitaire.
Et incompris, ce qui n'est pas si grave.

* noirs : Et les autres trous noirs avec du poil autour ?

Chauve qui peut quand M le Mélancolique est là !
Fin de ce sérieux intermède et maintenant passons aux choses rigolotes, si possible.

La petite chambre est dévastée.

Non mais tu t'es vu l'état des lieux ?

A son réveil, il trouva sur l'oreiller bleu ciel une petite robe blanche de mariée en papier découpé, Bertrand s'approcha de la fenêtre en se grattant ... la tête.
Un ronflement au dehors ... une tronçonneuse, on doit tailler les arbres du parc, Bertrand jette un oeil.
Non !
C'est Pierrette qui incise l'écorce des vieux frènes pour y graver joyeusement de grands coeurs percés de la traditionnelle flêche, avec au milieu ces deux initiales :
H* P.

* H : Le H c'est pour Hubert.

Il ne sait que penser, il ferme la fenêtre et va pisser.
Une autre petite robe était punaisée sur la porte des toilettes.
Devant ce nouveau symbole d'une future vie, Bertrand fût pris d'étranges convulsions.
Suivi d'un hoquet hyper-rapide.

Bertrand va t'il briser ce coeur tout neuf ?

" Elle veut se marier à tout prix ... pour le meilleur toujours d'accord !
Mais pour le pire ?
Il se vit accablé sous les obligations, les factures, les réunions (Argh !) de copropriétaires ... il deviendrait vite chauve !
Peut-être qu'il lui pousserait des verrues planteurs, ou des cales sêches sous les genoux ?


 

Parfois le pauvre mari n'a plus d'autres choix que de se cacher dans les arbres.

" Chéri, chéri, je vais tailler ... "

Le chéri descend vite de son escabeau. "
... les rosiers ! "

Aie ... alors il remonte.

Pas question de con voler en d'aussi injustes noces... réagissons vite ! "

En quelques minutes Bertrand avait rassemblé ses affaires et finissait de s'habiller dans l'ascenseur.
Il venait de passer sa veste, tel un poisson d'avril en mai, pendait dans son dos une petite robe blanche.

Pendant ce temps Pierrette essaie désepérément de résister au charme puissant de Bertrand.
Il faudrait lui expliquer qu'elle perd son temps, toute résistance est inutile car c'est magnétique.

En sautant d'arbre en arbre, Lapin.Blanc.Rapide (c'est un vrai écureuil !) parvint à sortir du parc, sa voiture est garée juste derrière l'église.
Sur le vénérable parvis une cérémonie s'achève, la mariée était en noir, et le beau marié tout en blanc, soudain il porte la main à son côté et s'effondre sous les dragées, l'émotion sans doute.
C'était un signe, Bertrand ne s'imaginait pas en marié, ni en père de famille ou en chet d'entreprise, en fait il n'aimait pas trop les responsabilités.


" J'en ai jusque là ! " rugit Bertrand le lion apprivoisé.
Patience ! Il a encore du crédit pour 25 ans.


Par contre il aimait beaucoup regarder les autres se marier, il était toujours sincèrement ému et reniflait durant toute les cérémonies.
Surtout au solennel moment où les futurs époux se jurent fidélité, protection, aide, sécurité sociale et assurance-vie. Il n'aurait jamais pu faire de pareils serments (cinq !).
N'étant pas du tout sûr de pouvoir les respecter, ni même d'en avoir envie.


Le gâteau sera consommé,
pas le mariage car une faille est apparue qui va en s'élargissant.

Pour quitter Gravounont, Bertrand devait repasser devant l'église, un nouveau mariage s'y déroulait sous un déluge de riz.
Cette fois le futur était en noir et sa jolie promise en blanc, après un petit mot de sa mère, la mariée s'effondre à son tour, en larmes : elle a oublié d'inviter tante Assion !
C'est grave ou non ?

Aperçus

A Gravounont des dindons
Sont clandestinement introduits
C'est dégueulasse

 

 

 

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