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JUSTINE
Le 9 avril à Foulouse
Justine et
le lapin
Quand il vit le
flash sur le bas-côté Bertrand jura effroyablement comme tout automobiliste
qui ne se respecte pas.
Deux kilomètres plus loin la fatidique fourgonnette l'attendait, le garçon
s'apprêtait à être le plus désagréable possible.
Etant l'offensé, il en demanderait raison et on allait voir ce qu'on allait
entendre !
Mais son agressivité s'atténua de suite à la vue de l'adorable gendarmette
qui lui faisait signe de se garer.
Avec son chignon bien rangé que surmontait un adorable petit chapeau,
la policière avait une fière allure de gente damoiselle, noble, de bonne
lignée et de bons usages.
Si bien que le garçon était presque content de monter dans le véhicule
bleu pour y remplir les papiers* d'usage et prolonger ainsi son ravissement.
* papiers :
" Ah cette forme, alitée ... ! "
Car sous l'uniforme,
le coquin voyait la femme comme d'autres excités voyaient sous les pavés,
la plage ( je m'efforce, de l'ordre ! ).
Sur la banquette quelques dessins étaient posés en vrac, soupçonnant qu'ils
étaient l'oeuvre de la fonctionnaire, Bertrand les considéra longuement
avant d'exprimer son admiration.
Productions
justiniennes
" C'est frais,
c'est beau, c'est léger ... comme vous ! "
Il savait être flatteur et d'ailleurs, trouvait vraiment jolies ces aquarelles
policières* ; leur auteur lui avoua qu'à ses moments perdus (il y en a
beaucoup dans son métier) elle aimait dessiner sur le bord des routes
les paysages alentour.
* policières
: Qu'il aurait cependant préférées polissonnes.
Elle signait simplement
Justine, Bertrand prétendit qu'il était aussi un passionné de dessin et
qu'il aimerait beaucoup lui montrer ses propres réalisations, son jardin
secret à lui (son jardin secret à elle, Lapin Blanc;Rapide rêvait de s'y
ébattre, il l'imaginait doux et touffu, en un mot, extraordinaire).
" Ce garçon ment comme il respire, c'est révoltant ! " penserez-vous,
c'est vrai mais sa seule faim justifie ses discutables moyens.
La brigadière Justine dit seulement :
" Pourquoi pas ? " avant d'ajouter aussitôt :
" Mais jamais pendant le service ! "
Ils convinrent donc d'un studieux et artistique rendez-vous en fin d'après-midi
à Foulouse toute proche.
Bertrand était bien content mais aussi très inquiet, il n'avait rien à
montrer à la gendarmette, pas le moindre croquis, juste de vagues et obscènes
gribouillis téléphoniques.
Comme ceux-ci.
Il se précipita donc en ville, acheta un énorme livre d'art dont il arracha
imédiatement toutes les pages avant de griffonner la signature du maître
disparu (depuis si longtemps, ça ne pouvait guère le déranger) ; puis
il ajouta son nom - Biquet - en bas des chefs d'oeuvres et fourra le tout
dans un carton à dessins tout neuf et atrocement cher*. Il était paré
et fonça à son rendez-vous de roman-photo.
* cher : S'il
avait vendu ses extincteurs à ce prix là, il aurait déjà fait fortune.
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Justine était à l'heure
(heureux effet de la vie militaire) et en civil, Bertrand l'admira
plus que jamais.
Il sortit ses faux que la jeune femme trouva tous magnifiques, aussi
beaux que ceux du divin Léonard, et pour cause.
Le garçon ne disait rien, un peu gêné (quand même), et pas très
rassuré car il craignait à tout moment d'être démasqué.
La menteuse monstration.
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Mais Justine
ne l'arrêta pas - quand il lui prit la main, elle ne le mit pas non plus
en garde (à vue ?) quand il caressa son joli biceps, elle effectua juste
un petit contrôle d'identité quand les lèvres de Bertrand se posèrent
sur les siennes.
Plus une petite contravention pour exès de vitesse quand il voulut glisser
sa main dans son corsage bien repassé.
Après elle lui passa ses menottes dans le dos et ce fût un grand trouble
à l'ordre pubique (pardon, public).
Mutuelle
fascination, le lapin a heureusement bien brossé ses incisives.
Ils s'étaient pris en flagrant délire, la ville était rose comme une vieille
carte postale, ils s'y promenèrent bras dessus, bras dessous en soufflant
dans des ballons captifs mis à leur disposition.
Toujours accrochés à leurs dirigeables colorés, ils s'arrêtèrent sur les
bords de la Garçonne.
" Oh Foulouse ! " eut juste le temps de s'écrier Bertrand avant que l'inspiration
ne le trahisse.
Pas complètement, il la retouva en regardant Justine et son joli nez.
" Quel merveilleux modèle ! " ajouta le garçon futé.
Cela éveilla immédiatement chez la fille l'envie de dessiner, de le dessiner.
Ils se chamaillèrent pour savoir qui servirait de modèle à l'autre, le
garçon ne cédait pas car il voulait la voir toute nue et il avait eu l'idée
le premier (enfin c'est ce qu'il croyait).
Bertrand proposa alors de jouer la décision au poker, si possible dans
un endroit tranquille ...
" Allons chez moi ! " proposa la foulousaine.
Chez Justine c'était plutôt bobo, mais sans gravité ... en tout cas c'était
une bonne cliente !
L'endroit était fort tranquille et la partie commença de suite.
D'habitude jouer aux cartes ennuie si totalement Bertrand qu'on lui propose
vite d'arrêter mais cette fois il était attentif, serrant son jeu avec
nervosité et impatience.
Du début il se mit à tricher*effrontément et sans état d'âme.
* tricher :
En pensant que Justine, légalement assermentée n'oserait pas le faire.
En fait, il ne connaît pas bien les femmes.
Réflexions
croisées doubles
Isolés
dans leur bulle rose, nos joueurs ne se quittent pas des yeux.
W.S.R
:
" Que se passe t'il ?
Je te sens nerveuse, non ? "
Justine
:
" Pas du tout, pourquoi ? "
Lui
:
" Elle bluffe, j'en suis (presque) sûr ! "
Elle
:
" Il triche, j'en suis (presque) sûr ! "
Ensemble
:
" Je vais faire semblant de le croire ... "
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Justine perdit
rapidement son chemisier ... quel bon début de partie !
Malheureusement la chance tourna bizarrement et Bertrand fut à son tout
défait, exit les chaussettes (pour une fois avantageuses).
Cette fois la main a passé vite ... dommage !
La partie était un peu désordonnée, comme leurs pensées.
Bertrand adorait dire :
" Pour voir ! " comme Robert Raifort.
Et il voyait de mieux
en mieux ; et de plus en plus.
Ils avaient bien
chaud maintenant mais comme ils se déshabillaient, cela tombait aussi
bien qu'une goutte de sueur.
Dehors la ville était toute rose d'émotions.
Bertrand trichait tant et plus mais Justine se défendait bien et ils furent
bientôt face-à-face, elle en culotte fantaisie et lui en caleçon sévère.
Le moment fatidique approchait, on allait voir du poil.
Il était temps de sortir ... le grand je (pardon, jeu), c'est à dire de
faire tapis, comme en Belgique.
" Cinq as ! " annonça t'il fièrement.
Justine n'en avait que deux, par contre elle avait dans son petit jeu
une autre paire qui attirait invinciblement les regards du Lapin.Blanc.Rapide.
Il n'avait pas
bien regardé par dessus son épaule car ce n'était pas une paire, mais
deux qui dansaient devant ces yeux brouillés.
Pouvait-il lutter avec son brelan dépareillé ?
Bertrand bluffa* encore et fit une annonce mirobolante.
* bluffa :
Le bluff est l'arme principal du séducteur mais le plus parfait bluffeur
est celui qui croit vraiment ce qu'il raconte, c'est cela le grand jeu.
" Je me couche
! " déclara soudain son adversaire avec un soupir découragé.
Bertrand n'était pas sûr d'avoir bien entendu, en tout cas il avait gagné.
Par abandon.
Chez Justine c'est
un peu bobo, mais sans gravité ... en tout cas, c'est une bonne cliente.
" Plus haut les mains ! " commanda t'il, signifiant sa reddition.
La raidition du Lapin.Blanc.Rapide était en cours, il était très fier
car il avait vaincu la police.
Viendrait bientôt le temps des doux outrages ... il en appelerait alors
à tous ces cons citoyens.
" Quelle belle peau lisse* nous avons ... s'extasiait-il ... et comme
elle est bien faite. "
* peau lisse
: De très grande proximité, la meilleure !
Quand à ses noirs dessins, personne ne las a jamais vus.
Par contre, on en connaît l'existence.
Un seul a survécu,
en le regardant on comprend pourquoi Lapin;Blanc;Rapide n'a opposé que
peu de résistance lors de son interfellation (pardon, interpellation).
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Quand on
le complimente sur son souci de réalisme et son goût du détail,
Bertrand rougit un peu et répond timidement :
" Tout* est dans le modèle ! "
* Tout
: Tout quoi ? Et où ?
Justine
avait maintenant du mal à (procès ?) verbaliser correctement.
Chacun son tour de se faire aligner, le lapin policier lui demande
ses papiers.
Elle n'était pas en règles, alors il l'embarque.
Les abus de pouvoir sont une vraie jouissance, tellement que ça
lui faisait flic de partout.
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Aperçus
A Foulouse,
on fume la pelouse
Avec des granulés
C'est curieux.
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