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Notre
héroïne est née très loin dans un pays très pauvre, si pauvre
que les habitants devaient vendre leurs enfants pour subsister,
alors ils en faisaient beaucoup ; et de préférence des filles
qui se vendaient mieux.
Parulie était la huitième d'une famile de quatorze, toutes ses
soeurs étaient déjà parties ; l'aînée, Gambusie, cêdée à un éleveur
d'escargots plutôt gentil s'en était bien sortie, Méandrine fût
" mariée " au père Fouettard, octogénaire aussi avare que peu
bavard et sa préférée, la douce Popeline, venait de partir pour
les maisons closes de la capitale, toute heureuse de loger enfin
dans une habitation qui fermait bien.
Le tour de Parulie était venue mais la jeune fille ne voulait
rien gagner à cette loterie ; elle avait préparé en grand secret
une bicyclette qu'elle cachait sur le toit de la bicoque familiale
en guise de girouette.
Un matin très tôt, un peu avant l'heure où blanchit la campagne,
la fugitive descendit le vélo de son perchoir et partit en roulant
doucement sur le chemin bosselé vers le futur couchant*.
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* couchant
: La naïve jeune fille pensait que c'était l'endroit où l'on se couche
et qu'elle pourrait enfin s'y reposer des tâches ménagères ; le mouchant
étant le lieu où l'on se mouche, le touchant, celui où l'on se touche
etc ...
Nous
retrouvons la douce Parulie à un moment délicat car elle vient de
crever (de la rour arrière).
Devant une grande ferme typique, deux chiens font la sieste au soleil.
Ils s'approchent de la jeune fille épuisée en remuant la queue et
engagent la conversation.
Parulie est fort surprise, qui sont ces bavards (et bizarres) toutous
?
Elle apprendra qu'ils se nomment Tox et Touky et qu'ils furent changés
en chien par une marâtre poilue.
" Quel grand malheur ! " compatit la belle.
Les bêtes lui répondent en choeur :
" Mais non, quel grand bonheur, plus besoin de se lever tôt pour
aller travailler, de s'inquiéter pour le loyer, les charges, les
factures et tout le tremblement ! "
Et Touky d'ajouter :
" Et ne plus se mettre dans une compétition infantile et sans honneur
comme des grenouilles dans un seau en se piétinant pour être au
dessus du lot ..."
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Le canin philosophe
soupire douloureusement, on sent que cette évocation lui rappelle de
pénibles souvenirs.
" sans compter les chiennes en chaleur de passage ! " renchérit Tox,
soudain égrillard.Parulie sent qu'il faut changer de sujet :
" Euh ... Et que faîtes-vous du libre arbitre ? "
A ces mots, les deux clébards s'écroulent de rire en se roulant dans
la poussière.
" Trêve de plaisanterie, dit Touky, et occupons nous de ce boyau malade,
hein Tox ! "
Ils s'y mettent à deux et pendant que Tox bouche les différents trous,
Touky pompe comme un malade tandis que Parulie sourit à la vie.
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A la force
des ses jolis mollets, Parulie a parcouru une longue route.
Elle vient d'arriver devant un gigantesque pont dont l'accès est
barré d'une non-moins gigantesque pancarte :
" Interdit aux non-voitures "
Impossible de continuer car les agents de la Libre-Circulation
surveillent le flux de véhicules.
Un autre cycliste est bloqué qui ronge ses freins depuis quelque
heures, ce qui ne sert à rien.
Bernarino (c'est le nom du sportif à deux roues) a les gencives
en sang, Parulie décide de ruser afin de pouvoir franchir l'obstacle.
Avec leurs deux bicyclettes réunies ils disposaient de quatre
roues ; ils recouvrirent leurs attelage de cartons sur lesquels
le garçon, artiste à ses heures creuses, dessina les portières,
les phares plus tous les équipements (sauf les options, le temps
pressait et menaçait) d'une berline de luxe.
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Ainsi camouflé,
ils prirent leur place dans le cortège puant et parvinrent sans encombres
de l'autre côté.
Pendant la fumeuse traversée Bernarino se grattait le nez afin de se
donner une contenance, Parulie souriait de ses blanches quenottes aux
automobilistes renfrognés.
Ouf, ils étaient arrivés à leur fin ; juste à temps car une violente
averse menaçait de faire fondre le petit véhicule qu'ils abandonnèrent
dans le fossé.
" Et pourtant, elle a tout d'une grande... " soupira Bernarino après
un dernier regard à l'épave.
" Désolé, mais je suis contre la montre ! " ajouta notre sportif en
remontant sur son mi-course avant de repartir, en danseuse, vers d'autres
exploits vertigineux.
Du bas de la côte, Parulie appréciait.
(à
suivre)
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