|  |  Equus a fait une grande découverte, 
        disons plutôt, pour être modeste, qu'il a résolu une question que les 
        amateurs d'art préhistorique se posent depuis longtemps : pourquoi les 
        animaux peints ou gravés sont ils rarement représentés dans leur totalité ? 
          Il y a bien sûr et comme toujours 
        de grandioses et magnifiques exeptions, mais bien souvent on ne peut voir 
        que leurs têtes, la ligne du dos ou celle du ventre et presque jamais 
        les pattes. Pourtant ils avaient des pattes, c'est certain ; alors nos ancêtres étaient-ils 
        fainéants ou distraits ?
 
 
         
          | 
 Essais 
              de chevaux placides.  |  | Non, ils n'avaient simplement 
              pas le temps de les dessiner en entier ; Equus s'en rendit compte 
              le jour où il décida d'aller dans le pré du voisin pour y faire 
              quelques croquis de chevaux " pris sur le vif ".  Il remarqua vite que 
              les capricieux quadrupèdes bougeaient tout le temps et refusaient 
              obstinément de prendre la pause, il ne pût jamais en dessiner un 
              complètement.  Alors essayez d'imaginer 
              la difficulté de représenter des animaux sauvages, agités, inquiets, 
              toujours aux aguets ou au galop.  |  | 
 Tentatives 
              et résultats mouvants.  |    
        
          | C'était presque 
            impossible, heureusement, l'homme de Cro-Magnon avait le sens de l'observation 
            et une bonne mémoire visuelle qui lui permettait de rentrer en courant 
            dans sa caverne pour y tracer d'un main sûre, d'un trait charbonneux 
            et souverrain, l'échine, le poitrail, la tête, les oreilles ou la 
            queue de son futur repas. |  | Un homme nommé cheval 
              et qui leur parle à l'oreille pour qu'ils acceptent de rester tranquilles. 
                 Préhistoriques essais. |  
        
          |  |   
              
                |  | A force de ratages 
                    ses voisins ont fini par ce moquer d'Equus, qu'ils appellent 
                    maintenant le " farceur cheval " ce qui ne l'encourage guère. 
                       On laisse des inscriptions 
                    sarcastiques jusque dans ses toilettes sêches. |    
              
                | En attendant le 
                    jour du vernssage approchait, on emmena l'artiste à l'hippodrome 
                    ou sur des manèges tournants pour lui donner des idées chevalines 
                    , on allait jusqu'à lui payer une fricassée d'hippocampes 
                    ou une demie* langue d'hippopotame en gelée verte.  * demie : Et 
                    ça suffit largement pour douze personnes.    On lui passait 
                    aussi des films de Fernandel entrelardés de subliminaux impératifs, 
                    une méthode soi-disant révolutionnaire.  Son cas était vraiment 
                    désespéré, il montait à l'envers même les plus belles juments. 
                     |  |   Il essaya bravement 
              de faire preuve (et oeuvre) d'imagination, considérant le résultat 
              il pensa sérieusement au suicide.  
 " Et 
              tu trouves ça beau ? " 
 Finalement on l'enferma 
              tout nu avec du papier et un peu d'avoine. Et c'est durant cette nuit qu'il fût visité.
 Pas par le docteur mais par un esprit à quatre pattes : Pet-Gaz.
 
 Le 
              quadrupède volant.  Equus le sentit avant 
              de le voir car le cheval ailé ne se déplacait qu'au rythme de ses 
              flatulences, un peu comme un avion à réaction.Il venait d'avoir sa dernière impulsion et ça puait comme jamais 
              dans la Fondation Gellipane.
 Mais Pet-Gaz n'était pas seulement venu pour péter, il avait aussi 
              un message :
 
              
                |  | " Si 
                  tu veux dessiner un cheval, tu dois devenir un peu cheval sur 
                  les bords et au milieu ... " |  Puis un vent formidable 
              (et favorable) propulsa l'étrange animal dans les airs. Equus souffla bruyamment par ses naseaux tout neufs, il écarta l'épaisse 
              crinière rousse qui lui bouchait la vue et se mit au travail.
 Au matin on aéra longuement la salle d'exposition avant d'enlever 
              les tas de crottin multicolores.
 " On se croirait au salon de l'agriculture ! " ironisa le 
              directeur.
 Equus dormait debout appuyé contre une cimaise, il hennit longuement 
              à notre approche.
 " Brave bête. " dit Peldugland en flattant* l'encolure de 
              l'artiste à crinière.
 " Il bande comme un cheval, c'est un début. "
 " Prometteur. " ajouta Miss Clitorini troublée, mais de là 
              à devenir la copine de cheval ...
 * flattant : Car les 
              artistes sont sensibles à la flatterie savez-vous ?    
  Bonne 
              thérapie, les résultats arrivent au galop.  
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