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 La Fondation 
        a mis ses habits de fête, en quel honneur ? 
 " Alors ça c'est une vraie 
        tuile romaine ! " s'écria le directeur après avoir décacheté la tranalpine 
        enveloppe et dévoré (seulement des yeux) son contenu. " Monsieur et Madame Gellipane* annoncent leur venue ... pour demain 
        soir et juste à un moment où il n'y a plus d'exposition ! "
 * Gellipane : A la fois 
        mécène et sponsor, il joue le rôle primordial de pompe à phynances. Il y a Monsieur 
        Gellipane, Madame, Magnumo le fils et Cornetta, la petite dernière.
 Une dynastie qui rêgne sans partage sur un empire fondant et parfumé.
   Depuis la fin précipitée de 
        la " Semaine de l'art Nak ", les visiteurs n'avaient plus rien à se mettre 
        sous la rétine. " Et Si nos invités pensent que nous ne branlons rien, ils ne donneront 
        plus d'argent. "
 " C'est terrible, qu'allons nous devenir ... " sanglotait Guy Molet.
 Octave des Obres faisait ses calculs :
 " Avec toutes ces pensions alimentaires, ce sera la ruine assurée ! 
        "
 Sentant venir la panique, le 
        directeur prit la parole vigoureusement : " Mes amis, profitons-en au contraire pour faire une exposition spécialement 
        pour Gellipane ! "
 " D'ici demain ? " s'inquiétait Daniel Burin qui avait beaucoup 
        de téléphone en retard.
 " Oui, nous travaillerons d'arrache-coeur dans un bel élan créateur.
 Il faut faire front, bloc, équipe et attention tout à la fois ! "
 Le chef avait parlé, la confiance 
        était revenue. A ces instants nous l'aimions beaucoup.
 Les lampes restérent allumées toute la nuit à la Fondation.
 
 Dedans c'était une vraie fourmillière, 
        les papiers glacés s'alignaient sur les murs. On discuta longtemps des différents parfums et de leurs possibles combinaisons 
        ou empilements.
 
 
         
          |  |  | Les jolis cônes ont fière 
              allure tout comme les fragiles cornets et leurs appétissantes boules, 
              et que dire des gélatis mousseux ? Rien.
   Seul le cône de Peldugland 
              fût refusé sans plus d'explications.  |  |  Finalement l'exposition était 
        tout juste prête quand les mécènes firent leur apparition dans l'entrée, 
        on ne pouvait pas ne pas les voir tant ils étaient gros. Surprise, ils n'étaient pas deux mais trois, la matrone tirant derrière 
        elle une bonbonne vociférante, l'héritier, le dernier des Gellipane.
 
 " Ah mais c'est Magnumo, comme 
        il a grossi ! " complimenta hypocritement le directeur." Il se porte bien, nous dit la maman béate, et il voudrait être un 
        artiste, alors on vous l'a emmené. "
 " C'est vraiment gentil ! " remercia l'assemblée.
   
        
          |  | On avait organisa pour 
              Monsieur Gellipane une visite de nos (pardon, de ses) locaux histoire 
              de lui soutirer un peu d'argent. Le tour était vite fait, l'astuce étant de parcourir plusieurs fois 
              les lieux afin de croire à leur immensité, entre deux passages on 
              changeait rapidement la disposition.
 Des enregistrements de 
              bruit de chantier diffusés partout complètait l'illusion muséale. 
               |    
        
          | Malgré 
              tous ces efforts, il n'y avait pas grand chose à montrer hormis 
              des gravats et le directeur d'improviser avec talent : 
 " Ici, 
              cher monsieur Gellipane la future médiathèque ... "    No comment. 
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          |   
 | " A cet emplacement 
              se dressera notre boutique de produits complètement dérivés ... 
              on pourra même y vendre des glaces ! " No comment.  " Mais tout ça va 
              coûter beaucoup d'argent (long soupir) ... je répète : tout ça va 
              demander un paquet de pognon ! " 
 No comment.  L'impassibilité même. 
               |  " Il est vraiment 
        bouché, lui souffla Peldugland déguisé en ouvrier, parlez-lui 
        en italien. "" Molto pépètes, si, capicci ? " articula péniblement le directeur 
        en frottant le pouce contre son index dans un signe caractéristique.
 Monsieur Gellipane le regardait avec curiosité mais ne disait toujours 
        rien.
 A force de tourner en rond, on finit par se retrouver à notre point de 
        départ avec le reste de la famille.
 Si notre mécène ne pipait mot, sa tendre moitié (plutôt trois-quart) ne 
        s'arrétait plus de parler :
 " Je vous ai apporté deux dessins que le petit (120 livres !) a fait 
        ce matin en finissant ses mousses au chocolat, ça ne lui a pas pris deux 
        minutes ! " et la dame sortit deux assiettes sales de son sac afin 
        de les soumettre à notre appréciation.
 " Regardez ça, vous allez bientôt pouvoir l'exposer. "
 
 On toussota 
        longuement, puis on fit semblant de s'intéresser.  " Quel chocolat employez-vous 
        ? " " Un éclair ! "
 " C'est merveilleux ! "
 " Quelle force, quel tempérament, mais je crains que ça ne soit pas 
        possible ... du moins dans l'immédiat, ne gâchons pas ce prometteur talent 
        ! "
 " Et pourtant on est pas difficile ! " dit une toute petite voix.
 
        
          |  | A l'énoncé 
            du très diplomatique refus, le monstre se mit à faire une crise de 
            nerts et disparut en roulant vers la salle d'exposition dont le fragile 
            plancher ne résista pas longtemps. - Cracck -
 Le surpoids considérable de Magnumo avait tout fait craquer et l'artiste 
            en herbe était au fond du trou, dont il refusait de sortir.
 |  Un si joli plancher !  
        
          | Magnumo se faisait gonfler 
              (comme souvent les artistes), impossible donc de le bouger. Madame Gellipane s'évanouit tandis que son mari restait complètement 
              absent.
 Il fallait pourtant trouver une solution car on allait pas le garder 
              ici, ou peut-être comme otage ?
   La tactique 
              de la gonflette par Magnumo.
 |  |  " Utilisons le principe 
        d'Archimède ! " suggéra Guy molet qui fût félicité pour son sens pratique. 
        On alla chercher tous les tuyaux disponibles afin de pouvoir remplir le 
        trou d'eau.
 Les branchements sont faits, petit à petit le niveau monte et Magnumo 
        se met à flotter (en partie grâce aux bouées attachées autour de son ventre 
        rond).
 " Les artistes flottent ... ainsi que les sorcières ? " s'étonnait 
        Guy Molet en trempant ses chevilles enflées.
   L'opération 
        prit un certain temps (celui qu'il faudrait pour remplir sa piscine). 
        
          |  | Miss Clitorini en profitait 
              pour faire quelques longueurs de cimaise, elle faillit être emportée 
              par le flux quand on ouvrit les cloisons étanches (plus quelques 
              goujons égarés). La masse d'eau avait emporté au loin Magnumo et ses parents ; l'opération 
              était une sorte d'échec, convenons-en.
 
 |  Mais le pire restait à venir, 
        debout au milieu des débris de toutes sortes le directeur fixait d'un 
        air égaré une nouvelle missive. Cette lettre nous annonçant 
        pour demain soir l'arrivée de Monsieur et Madame Gellipane.
 Mais alors c'étaient qui les trois guignols ?
 Mystère et crème glacée...
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